One. Tous les amateurs de séries et livres d'action auraient aimé avoir la famille, les parents que j'avais. Enfant unique, je suis le seul fils de deux détectives renommés et respectés. Ils ne travaillaient pas dans la même division, faisant en sorte que chaque soir, ils rapportaient chacun de leur côté des histoires différentes. Des histoires qui faisaient rêver parfois et qui faisait en sorte que mes parents étaient mes héros. Grâce à eux, je me sentais en sécurité, tout en ayant un paquet d'histoires à raconter à mes camarades de classe lorsque j'étais gamin. Si ç'avait duré, je suis persuadé que rien n'aurait changé. Deux. Évidemment, ça ne dura pas. Lorsque j'avais douze ans, ma mère s'absenta pour une mission et n'en revint pas, assassinée par un des malfaiteurs qu'elle cherchait à coincer. Mon père en a souffert, et moi j'en ai souffert, pour finalement ne jamais passer au travers de ce décès soudain et douloureux. C'est absurde pourtant; j'avais encore mon père, nous aurions pu nous soutenir, faire en sorte d'aller mieux, lui et moi, mais ce n'est pas ce qui arriva. Comme si c'était ma faute, alors que clairement, je n'y étais pour rien, mon père se referma, se faisant froid, distant avec moi. Limite, j'aurais pu l'endurer, mais tout devint, au fil du temps, plus complexe, plus douloureux. Torture physique et psychologique, voici ce qui s'ensuivit. Trois. Avoir une situation familiale difficile ne me réussit pas. À l'école, impossible de me montrer vulnérable avec qui que ce soit. Du coup, je cachais ma tristesse et ma souffrance dans des allures de beau garçon arrogant qui se moquait des cours. Je me souciais que trop peu de mon avenir, à défaut de savoir si j'allais en avoir un, un avenir. Quatre. Tout finit par se retourner contre moi. À défaut d'avoir des résultats acceptables, aucune université ne voulut m'accepter. Et pourtant, ce n'était pas comme si je n'avais pas essayé dans plusieurs programmes, ne sachant que faire de ma vie. Mon seul plan, c'était de fuir mon paternel, et je n'y arrivai pas, puisque la seule option qui me resta, ce fut d'aller à l'académie policière. Je n'avais pas les capacités, je n'avais pas les résultats, et j'y entrai quand même, gracieuseté de mon paternel qui avait demandé une faveur à son alma mater. Inutile de mentionner que je ne m'en suis jamais vanté. Cinq. Surveillé de près à l'Académie et à la maison, je n'eus pas d'autre choix que de m'efforcer de bien faire mes classes et graduer de l'Académie, devenant automatiquement policier, évidemment gardé à Bishopville pour progresser. Le tout me confirma que je n'étais pas fait pour respecter des ordres. J'avais un talent pour le métier, mais devoir me conformer à tout, ce n'était pas fait pour moi. Et pourtant, je le fis. Ce fut majoritairement grâce à l'aide d'un ami de l'université qui, plus tard, devint mon partenaire. Pour ça, je lui dois beaucoup. Sans lui, je serais allé ailleurs bien avant le moment où je le fis. Six. C'était il y a quatre ans. Nous étions en mission, et il arriva à mon partenaire la même chose qui était arrivé à ma mère; il se fit tuer en plein travail, et j'étais là, il était décédé avec moi, je l'avais senti partir. Mon meilleur ami, la seule raison pour laquelle je supportais encore son métier. L'annoncer à sa défunte femme fut difficile, vivre au quotidien sans sa présence, invivable. Alors que boire, fumer, consommer, je ne faisais ça que le soir, mais là, c'était à la pause repas, c'était le matin, c'était tout le temps. Qu'importe l'action qui se passait au travail, j'avais toujours un peu de résidu de poison dans le corps, parce que c'était ainsi que je passais au travers de mes journées, ou que je survivais à celles-ci plutôt. Sept. Tout s'arrêta environ un an après son décès. Il était tard le soir, je patrouillais seul pour une fois, et j'étais dans un état pas possible. J'étais sorti de mon véhicule de service pour aller arrêter une querelle de rue, ce qui aurait du être simple, une routine. Je me retrouvai devant des individus qui avaient probablement encore plus consommé que moi. Un premier vint à m'assener un coup, et je ne fis rien. Un second coup arriva, je tombai au sol, et au final, je me laissai frapper, me rappelant clairement avoir fermé les yeux, dans l'espoir qu'ils finissent par me battre à mort et que mes souffrances se terminent à ce moment. Huit. Je me réveillai quelques jours plus tard à l'hôpital avec de multiples blessures. Fractures, traumatisme crânien, je saurais toutes les recenser. Mais cet incident, que je comparais parfois dans ma tête à une tentative de suicide imprévue, fut le moment où je pris la décision que je n'allais pas rester policier. Je n'y parvenais plus, j'en avais eu la preuve claire. Après avoir obtenu mon congé de l'hôpital, je pris un temps chez moi, histoire de voir ce que je pourrais faire de ma vie. Neuf. Deux mois plus tard, je prenais une décision; devenir détective privé à mon compte. Je ne savais pas comment j'avais choisi de le faire, je ne savais pas le déclencheur, mais j'avais choisi d'essayer. J'avais un talent de déduction, il fallait que je l'utilise, mais en étant à mon compte, je pouvais choisir mon rythme de travail, tout dans ma vie. Pour le moment, cela ne me déplait pas. Évidemment, les premiers mois n'ont pas été simples, d'où le fait que j'ai continué d'être consultant pour la police de temps en temps, et je le fais toujours, mais encore une fois, je n'ai plus de contraintes à respecter, que ce soit dans le temps ou mes méthodes. J'essaie encore de m'ajuster à cette vie, découvrir des choses que je ne connaissais pas vraiment avant, et avancer, cette fois-ci, comme moi, je le souhaite.