1983 – C’est le lendemain de la première journée d’automne de l’année 1983, une relativement belle journée comme il peut encore y en avoir vers la fin du mois de septembre, que j’ai vu le jour. Je suis né d’un père américain natif de Bishopville et d’une mère suédoise. Ces deux-là se sont rencontrés en Suède alors que mon père y était allé faire ses études. Une fois ses études terminées, il a choisi de rentrer à Bishopville, et ma mère l’a suivi.

1991 – Je suis un enfant unique, je suis heureux, j’ai toute l’attention de mes parents et cela me convient bien. Toutefois, je me sens quand même un peu seul et je finis par avouer à mes parents qu’il me plairait bien d’avoir un petit frère ou une petite sœur dont je pourrais m’occuper. Etre seul, et avoir toute l’attention de ses parents c’est bien, mais pouvoir s’occuper d’un petit frère ou d’une petite sœur et de jouer avec, c’est beaucoup mieux, enfin c’était ce que je croyais.

1993 – En janvier, mes sœurs, des jumelles, sont nées. Deux magnifiques petites filles blondes qui avaient choisi la couleur de cheveux de maman alors que moi j’avais choisi ceux de papa. En réalité, elles avaient tout pris de maman, même la couleur des yeux. Quant à moi j’avais pris un peu des deux. Au début j’étais vraiment heureux de leur naissance, mais j’ai vite changé d’avis.

1998 – Rapidement, j’ai perdu toute l’attention de mes parents qui n’en avaient plus que pour Annabel. J’étais triste d’avoir perdu l’attention de mes parents, mais au moins j’avais pu y gouter, pas comme Cheyenne qui avait toujours été dans l’ombre de sa sœur jumelle. Alors que les deux fillettes n’avaient que cinq ans, le médecin a annoncé à mes parents qu’Annabel était précoce, elle savait déjà lire et écrire. J’avais beaucoup de peine pour Cheyenne.

1999 – Je sens que Cheyenne a de réelles difficultés à l’école, elle n’arrive pas à lire, elle fait un blocage. Le fait qu’elle soit séparée d’Annabel à l’école n’aide en rien. Alors du haut de mes quinze ans, alors que ma petite sœur n’en a que six, et alors que je dois également gérer mes cours et mes devoirs, j’ai décidé de l’aider, de mon mieux et je voyais que ses efforts payaient jour après jour. J’étais content de moi d’être parvenu à l’aider et fier d’elle d’avoir vaincu cette « peur » des lettres. C’est ainsi qu’elle et moi on s’est rapproché, elle s’éloignant d’Annabel et moi la délaissant encore plus que ce n’était le cas.

2001 – Venant de terminer le lycée, il est temps pour moi de partir à l’université. J’ai choisi d’aller étudier l’architecture dans le but de devenir architecte à UCLA. J’avais envie de changer un peu d’air, de voir de nouvelles personnes, de nouveaux paysages. Bishopville ce n’est pas si mal, mais à force c’est un peu lassant. Je suis jeune et j’ai envie de connaître autre chose, je reviendrais peut-être à Bishopville plus tard.

2003 – C’est pendant ma troisième année d’université que j’ai rencontré cette femme, celle dont je suis tombé fou amoureux et avec qui je pensais que je ferais ma vie. Jusqu’alors, je n’avais jamais eu de vraie relation sérieuse, juste des amourettes d’adolescent si je pouvais dire. Elle a fait chavirer mon cœur, je l’aimais passionnément.

2005 – Alors que je croyais que je ferais ma vie avec elle, le destin n’était pas du même avis. Elle a obtenu une bourse pour aller finir ses études à Hawaii. Concrètement, je n’avais absolument pas les moyens de la suivre. Je parvenais correctement à payer mes études à UCLA avec mon emploi étudiant, mais je ne pouvais pas m’offrir plus. Elle est partie, nous nous sommes séparés, ce fut une réelle épreuve pour moi.  

2006 – Je viens d’obtenir mon diplôme pour exercer le métier d’architecte. La vie à Los Angeles est devenue beaucoup trop dure pour moi depuis son départ. J’avais juste attendu de terminer mes études pour ne pas changer d’université au cours de mes études, mais ma décision était déjà prise, je rentrais à Bishopville. Je souhaitais repartir à zéro, tenter de l’oublier, d’aller de l’avant. Pour cela, j’ai changé toutes mes coordonnées, voulant vraiment repartir à neuf et ne pas apprendre par erreur qu’elle avait refait sa vie et qu’elle allait se marier alors que je l’avais encore dans la tête.

2010 – J’ai appris que ma sœur Cheyenne venait de tomber enceinte alors qu’elle n’a que dix-huit ans. J’ai un peu peur pour elle, savoir comme elle va s’en sortir puisqu’elle a été mise à la porte par nos parents quand ils l’ont appris. Toutefois, même si je ne comprends pas son choix, je suis là pour elle et la soutient. Je suis même en mesure de lui venir en aide financièrement si elle en a besoin, même si je sais qu’elle est bien trop fière pour demander de l’aide pour cela.

2011 – J’exerce en tant qu’architecte et je gagne plutôt très bien ma vie. D’ailleurs, je viens de rencontrer une femme avec qui je me sens vraiment bien. Je suis heureux je crois. La vie est simple, nous nous entendons bien et même si nous ne parlons pas vraiment de l’avenir, nous apprécions notre vie ensemble. Après quelques mois de relation, nous nous sommes installés ensemble. Et c’est à ce moment que nous avons commencé à avoir des projets. Puisque j’avais de l’argent, je faisais au mieux pour la gâter, même si je savais que les cadeaux ne faisaient pas tout, mais ça nous convenait à tous les deux.

2012 – Je l’ai demandé en mariage, et elle a dit oui. Sauf que quelques semaines avant notre mariage, je l’ai trouvé au lit avec son meilleur ami. J’ai alors tout compris. Elle se fichait de moi depuis le début, elle n’était avec moi que pour argent et ne m’avait jamais aimé, j’avais été assez stupide pour croire le contraire. J’ai été très affecté par cette rupture, mais je me suis vite rendu compte que je ne l’aimais finalement pas autant que je le pensais, ce ne fut donc pas si difficile que je l’aurais cru de m’en remettre.

2019 – Depuis ma rupture juste avant mon mariage, je suis devenu un homme à femme, aimant varier les plaisirs et ne souhaitant plus m’investir dans une relation qui pourrait finir par me faire souffrir. Pour le moment, cela me va bien comme ça. J’ai trente quatre ans et toute la vie devant moi, j’ai juste envie de profiter, comme je ne l’ai pas fait avant. Lors d’une soirée d’un ami qui venait de remporter une victoire en patins, j’ai couché avec une femme qui n’était autre que sa partenaire sur la glace. Ce que j’ignore, c’est qu’elle est la sœur de celle dont j’étais tombé amoureux à l’université.

2020 – Je vis ma vie simplement, en profitant, sans franchement me soucier de ce qu’il se passera demain. On ne vit qu’une fois, et je ne veux pas avoir de regrets de ne pas avoir fait telle ou telle chose quand je serais vieux. Advienne que pourra.